Il suait, il courait, il trébuchait, il tombait…et les cailloux lancés sur lui par ces satanés gamins lui lacéraient le dos et aussi les pattes. Il pensait « en haut de la côte , je n’y arriverai jamais !…Tout à coup, il s’écroula, épuisé..C’était fini pour lui..Il le payait cher de s’être sauvé de la maison de son maître Eliezer, lui , Bilochon, qui n’était qu’un pauvre baudet.
Mais après six années de mépris et de coups de trique, il n’en pouvait plus ! Sans arrêt on se moquait de lui, de ses grandes oreilles, de sa façon de parler en disant « Hi han hi han ! » maintenant la bande de gamins approchait, on allait le lapider.
Soudain, dans un grand cri, ils se sauvèrent tous, épouvantés. Une grosse bête , avec de grandes cornes, sortait de l’étable. C’était Nestor, le bœuf de maître Johanam ; pas méchant pour deux sous,, mais qu’il était impressionnant !. Il poussa un « Meuh » si puissant que les gamins dégringolèrent la côte tout à fait terrifiés,
Dépêche-toi lui dit le bœuf rentre donc espèce de…mais surtout ne dis rien .pas de hi han ici silence regarde plutôt là dans le fond de l’étable le baudet leva la tête et ouvrit un œil il sursauta, dans un coin à l’ombre,il y avait debout un grand homme, fort comme Eliezer son maître ,Le pauvre animal, il tremblait de toutes ses pattes sûrement que cet homme-là allait le dénoncer , le renvoyer et le mettre à la porte,
Il ouvrit son deuxième œil. Allongée près de l’homme, se tenait une femme vraiment jolie, vraiment paisible avec un beau sourire il sentit alors couler en lui une grande douceur comme si sur l’heure il allait savourer un fin bon chardon de la montagne d’à coté.
N’aie pas peur, approche, lui dit Nestor. Ces gens-là sont comme toi ; ils ont du quitter leur maison,ils ne te feront aucun mal Allez approche, n’aie pas peur.
Maître Bilochon, lui dit l’homme -Tiens comment connaît-il mon nom de baudet, cet homme-là ? -est-ce que vous pourriez nous faire la grâce de rester à notre service ? – , Bigre, nom d’une pipe, on ne m’a jamais parlé ainsi. « Nous aurions besoin de votre aide pour transporter Marie et son petit enfant. »
Ah, en voilà une histoire ,se dit-il en lui-même
Ce petit enfant, Bilochon ne l’avait jamais vu si petit et caché dans la paille jamais vu ça se répéta le baudet Impensable ! Un enfant dans de la paille pauvre petit il est pourtant si gentil j’espère que lui , au moins, on ne lui jettera pas de cailloux comme on l’a fait pour moi.
Bon, lui dit encore Nestor, tu ne vas pas rester là planté comme un sot. Tu ferais mieux de le réchauffer, ce petit marmot. Assieds toi et souffle oui, envoie lui ta chaleur comme tu peux, non pas comme ça, pas si fort, tout doucement régulièrement , comme une brise de printemps qui arrive quand les vignes commencent à bourgeonner là c’est mieux Moi pendant ce temps je surveille la porte des fois que des soldats d’Hérode viendraient par ici
Bilochon était heureux comme vous ne pouvez pas imaginer qu’on puisse être heureux. Car le petit enfant, doux comme un p’tit Jésus, souriait , souriait, souriait tout plein Ah qu’il était beau ce petit enfant-là. Ce n’est pas lui qui le poursuivrait en riant et en se moquant de ses grandes oreilles de baudet.
Bilochon sentit tout d’un coup comme une grande paix intérieure qui descendait en lui
alors il se mit à chanter : pas des hi han comme à l’habitude non, mais une vieille chanson que sa grand mère lui avait appris quand il était plus jeune
« dors, min ptit quiquin, min ptit pouchin, min gros rojin »
Nestor n’en revenait pas et ouvrait ses grands yeux de bœuf « mais qu’est-ce qui lui prend à Bilochon ?
L’enfant lui signe avec sa petite main ; viens ici, Bilochon, écoute ; il lui caressa l’oreille puis il approcha sa bouche et lui dit doucement d’une voix claire « merci, Bilochon tu es le plus beau de tous les ânes que mon Père a faits , Bilochon, lui, n’y comprenait rien. Ah non ne dis pas ça si tu savais comme j’étais malheureux chez mon maître Eliezer.
Je le sais , je le sais , alors, est-ce que veux changer de vie et aller dans un pays où tous les enfants seront gentils avec toi ?
Bien sur, bien sur, mais pour moi, c’est impossible je ne suis qu’un pauvre baudet
Ferme les yeux et fais-moi confiance demain matin tu seras bien loin d’ici
Clic clac ! Bilochon rouvrit ses deux yeux d’un seul coup Où est-il donc allé se fourrer ? Tout autour de lui, il voyait plein d’enfants, surtout des blonds avec des yeux bleus ; non pas du tout comme ceux de son ancien patelin où ils étaient bruns avec des yeux noirs.
Et tous ces enfants souriaient de bon cœur Oh qu’il est joli Oui, vraiment beau et puis, il n’a pas l’air méchant Tu voudrais bien dis, jouer un peu avec nous ? Bilochon, écoutant ça, se mit debout en se redressant comme Artaban « oh qu’il est costaud « dirent ensemble tous les enfants
Et Bilochon pensa en lui même « ah si Nestor pouvait me voir il serait si fier de moi mais dites moi les enfants,où est-on ici ?
Les enfants en l’écoutant se mettent tous à rire « comment tu ne sais pas ça ?
Mais non, répondit Bilochon je ne sais rien !
Bin ça alors ! Lui dirent les enfants mais ici c’est Rousies
Rousies, rousies ? Jamais je n’ai entendu parler de ce pays
Qu’est-ce vous dîtes ? C’est le paradis des baudets ? Ah bon alors en voilà une bonne raison pour ne plus m’en aller ailleurs
c’est entendu les enfants je vous le promets je reste ici avec vous
et je jouerai avec vous tous et je vous promènerai sur mon dos et vous conduirai à l’école et pour finir je chanterai pour vous de ma plus belle voix Hi Han Hi Han Hi Han